“J’ai passé mon confinement sans smartphone ni console ; j’ai dû m’occuper comme je le pouvais, car je n’avais pas d’autre chose à faire…”
Vivre sans smartphone est une expérience que nos adolescents ne pourraient même pas envisager une seconde. Pourtant l’autorisation ou l’interdiction du portable est souvent un enjeu d’éducation et les parents modernes n’ont parfois pas d’autre moyen que de menacer leurs progénitures d’un retrait immédiat de leur joujou numérique pour obtenir ce qu’ils attendent d’eux. Chantage ou moyen de pression malhonnête, désemparés face à l’omniprésence et l’utilisation excessive voire addictive par certains adolescents, les parents sont bien souvent contraints d’en arriver là.
Débrancher, couper le wifi, ranger l’appareil, supprimer l’accès ou confisquer l’objet du délit. La décision est parfois excessive et radicale. Et c’est souvent un « électrochoc » pour l’adolescent. Alors faut-il en arriver là pour leur permettre de lever “un peu les yeux” de leur smartphone ?
Privation ou libération pour l’ado?
Ecrit par un jeune garçon de 12 ans qui a souhaité rester anonyme, sa maman m’a adressé son témoignage …
« J’ai passé mon confinement sans téléphone ni console ; j’ai dû m’occuper comme je le pouvais, car je n’avais pas d’autre chose à faire. Je me suis mis à créer et encore créer jusqu’à ce que je récupère mon téléphone au bout de plusieurs mois…
J’ai construit une cabane dans un olivier de mon jardin, là où j’allais avec mon chat, lequel restait pour me tenir compagnie. Ma cabane a été mon passe-temps pendant plusieurs semaines ! J’ai essayé aussi de créer un potager. J’ai fait les semis que j’ai arrosés pendant des semaines. Malheureusement, je n’ai pas réussi à les planter…. Puis j’ai inventé de nombreux objets et j’ai fait de l’art plastique. J’aime bien faire des pastels, et j’ai taillé un savon pour reproduire une œuvre de Miro !
Je devais, de toutes les façons, faire des choses pour tuer mon ennui, mais bon, après j’avais mes devoirs à faire comme tout le monde et tous les jours, mon frère et moi faisions du sport puis une balade en fin de journée, le soir, avec mes parents. Nous faisions également tous les 4 des jeux de société. Je me suis mis à lire également plein de BD, toute la série des Astérix ! J’ai adoré !
Pour le goûter, je faisais des smoothies et des gâteaux avec ma mère et mon frère, c’était très bon, on en faisait souvent ! On changeait de fruits tous les jours pour varier les goûts. Malheureusement j’aurais pu voir mes amis mais nous étions en confinement dans cette période-là à cause de la COVID-19. Donc nous sommes restés en sécurité jusqu’à la fin de l’épidémie.
Voilà comment moi j’ai passé mon confinement et je l’avoue j’ai finalement j’ai passé du bon temps sans avoir accès à mon portable »
Cette expérience (la conséquence d’une punition) s’est révélée être à sa grande surprise une expérience positive pour lui-même et pour toute sa famille. Pour beaucoup de familles le confinement a été un moment propice aux retrouvailles et aux partages. Cette situation inédite a permis d’expérimenter une nouvelle vie familiale.
Pour ou contre le smartphone?
La question d’acheter un smartphone ou non à son enfant se pose parfois très tôt. Pression sociale, avec le “tous les copains en ont un”, l’entrée au collège, horaires décalés, sécurité, autant de raisons pour lesquelles les parents peuvent craquer. Difficile de prendre la bonne décision. Acheter un smartphone n’est pas une décision qui se prend à la légère et demande une longue réflexion. Même si le rôle principal de cet appareil est de pouvoir appeler et envoyer des textos, ce qui intéresse les enfants ce sont plutôt les applications. C’est avec elles que va démarrer leur vie virtuelle à travers les réseaux sociaux entre autre.
Pour des jeunes qui n’ont pas le recul nécessaire pour faire face aux menaces, insultes ou encore rumeurs… c’est l’exposer à des risques parfois aux lourdes conséquences. Les conséquences sont aussi en terme usage qui peut vite devenir excessif pour un jeune comme pour un adulte. Une opportunité de passer des heures dessus, de scroller, de s’éloigner des autres, de ne penser qu’à ça et de gâcher beaucoup de temps libre !
Parfois, il faut faire un choix difficile pour des parents tiraillés entre l’envie de préserver leur progéniture ou le risque de le marginaliser. Aujourd’hui ne pas posséder un smartphone semble relever plus de l’anomalie que de la norme et le smartphone semble être un accessoire essentiel dans le processus d’identification à l’adolescence aujourd’hui.
Finalement la question n’est pas de savoir s’il faut en acheter un mais plutôt de savoir de quelle manière doit-on mettre un smartphone dans les mains d’un adolescent…
Si l’on devait définir un âge raisonnable pour acheter un smartphone à son enfant certains diront 15 ans. C’est le cas d’un groupe de ” Parents unis contre les smartphones avant 15 ans ” sur Facebook qui rassemble des parents qui veulent résister à la pression émise aussi bien par leur adolescent que par la société pour donner un smartphone. Un groupe à contre-courant de parents qui se serrent les coudent. D’autres s’accorderont sur 13 ans, l’âge symbolique où l’on devient adolescent et c’est aussi l’âge officiel pour s’inscrire sur les réseaux sociaux.
Selon le second Observatoire des pratiques numériques des Français (1) mené par Bouygues Telecom en 2018, un grand nombre de collégiens sont directement concernés puisque la quasi-totalité d’entre eux est équipée d’un portable (87% pour les 11-15 ans) et 68 % des enfants interrogés avaient un smartphone à leur entrée en sixième.
Pour rassurer les parents, ce n’est pas uniquement une question d’âge mais plutôt le niveau de responsabilité, de maturité de l’enfant et surtout l’usage qu’il en fera. La clé se trouve dans le bon usage du numérique: l’éducation au numérique.
L’interdiction n’est certainement pas la bonne solution. Il faudrait pouvoir les accompagner devant l’écran dès le plus jeune âge, ouvrir le dialogue. Avec l’introduction du smartphone on devrait continuer: les aider à déjouer les pièges d’Internet (aiguiser leur sens critique, les aider à prendre du recul sur les informations véhiculées, aborder le risque d’harcèlement en ligne, de l’usurpation d’identité, des violences, de la pornographie…
Comment faire le bon choix pour son ado?
Après avoir pesé le pour et le contre, la décision prise, il serait prudent de suivre quelques conseils :
- Choisir un modèle simple (au début on peut donner un téléphone portable qui n’a pas toutes les fonctionnalités d’un smartphone)
- Choisir un forfait bloqué (trouver le bon forfait adapté à son âge et son utilisation)
- Installer un contrôle parental (définir les créneaux horaires)
- Définir une règle d’utilisation la maison (pas de téléphone dans la chambre, ni pendant les repas…)
- Définir une heure de couvre-feu (heure limite d’utilisation)
- Charger le smartphone à l’extérieur de la chambre (surtout la nuit)
- Dialoguer et l’informer des risques !
Enfin sans culpabiliser, nous oublions parfois que si nos ados ont du mal à s’éloigner des écrans, il en est de même pour nous. Trop souvent attirés par nos appareils numériques, il parait difficile de demander à son enfant d’être différent. Le dernier et peut-être premier conseil à donner est certainement de montrer le meilleur exemple possible, quand c’est possible ! Et pour les plus petits il existe un outil éducatif pour l’aider à limiter le temps d’écran.
Un grand merci à Caro et son “Ado” pour le témoignage. “Tu lui as permis d’ouvrir les yeux, tu lui as montré que c’était possible et même agréable…”
Pour aller plus loin: le collectif Lève les yeux !
2 réponses
Ah les ados et les téléphones, c’est vraiment toute une histoire je vous ne le fais pas dire. J’en ai fait le frais avec mon ainée. Je trouve que les parents cités dans cet article qui ont pu confisquer le téléphone de leur ados pendant le confinement sont vraiment courageux. Félicitation vraiment. Avec mon cadet qui vient d’avoir 12 ans et qui réclame déjà son smartphone, vos conseils sur le choix du téléphone sont très utile. Souhaitez-moi bonne chance pour trouver le téléphone adapté et pour pouvoir bien accompagner mon fils;)
Bien qu’elle ait 16 ans, j’interdis à ma fille d’emmener son téléphone dans sa chambre. De même, je la prive aussi de son téléphone dans certains endroits comme la salle de bain, les toilettes ou à table. Des règles qui ont été difficiles à appliquer au début mais qui à la longue sont devenues une habitude pour elle et cela ne la tue pas. En fait je pense qu’il suffit juste d’expliquer à votre ados les raisons de l’interdiction et ça ira. Courage à nous tous parents !!!!